LA « LIBERTE DE PAROLE » N’EST PAS LA « LIBERTE D’EXPRESSION »

La liberté de parole, comme toute liberté, est soumise au paradoxe que le terme « liberté » porte en lui-même : « je peux » et en parallèle « l’autre peut » également.

Elle peut aussi s’opposer à la « liberté d’expression ».

Je revendique la « liberté de parole », cette « parole pleine » de Lacan (in Fonction et champ de la parole et du langage, Écrits I, p. 130). On peut définir la « parole pleine » comme une nouure entre savoir et désir : elle ne sert pas à communiquer, et s’oppose, en cela, à toutes les notions d’intentionnalité. On parle de « parole pleine » quand la parole est, dans une identité à ce dont elle parle.

Cette liberté est d’autant plus complexe qu’elle porte sur plusieurs éléments engagés par l’acte de parole : elle concerne simultanément les conditions de l’expression (où, quand, avec qui…) et sa substance (de quoi, jusqu’où…). 

Dans un monde où tout est dit quel que soit le moment, et conscient de ce paradoxe et de cette complexité intrinsèque à la liberté de parole, il me paraît essentiel de proposer un accompagnement à son appropriation. 

Ainsi semble-t-il pertinent d’éduquer nos enfants à la liberté de parole, mais je me demande en parallèle quels moyens peuvent être à notre disposition pour cela. Pendant quinze ans, j’ai milité pour cette mise en œuvre, dans le cadre d’un Mouvement d’Education dite Nouvelle, puis de divers Institutions Socio-éducatives ou Para-éducatives. J’’avouerai depuis ne plus être en mesure d’y apporter une contribution, sans doute parce que je ne suis plus en « position de questionnement éducatif ».

Je ne suis plus dans le Mouvement d’Education Nouvelle, je ne suis plus « père », je ne suis plus « professeur », je ne suis pas encore « grand-père ». Je ne suis plus qu’un « citoyen », un « civitas Romana optimo jure » lamda. Dès lors, puis-je encore m’exprimer sur le sujet. Oui, j’en ai la liberté.